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“Liberté” en 2021 – hymne de l’espoir revenu

Aggiornamento: 24 gen 2021

Nous sommes le 23 juin 2020, à 8 heures du matin, je souris au message de «Bonne chance » d’une personne à qui je tiens beaucoup, avant d’éteindre mon téléphone et rentrer dans la classe. Je me sens en sécurité, dans le lycée qui m’a accueilli tous les matins pendant cinq ans, mais c’est fatigant de ne pas pleurer quand je regarde que personne n’a plus tourné les pages du calendrier depuis le mois de mars. Je peux enlever la masque, mais je suis perturbée de ne pas pouvoir regarder le sourire de mes professeurs et de ma mère. Je m’assois devant la commission : on est tous espacés, il y a une très forte odeur de désinfectant et un petit frisson d’excitation court le long de mon dos, comme pour me réveiller d’un détachement émotionnel que je ne ressens pas vraiment. Après avoir introduit le thème du « Voyage » dans la littérature, je commence à parler du poème qui m’a fait vibrer le cœur pendant la DAD : « Liberté », du poète partisan français Paul Eluard. Je vous rappelle quelques strophes :


« Sur mes cahiers d’écolier

sur mon pupitre et les arbres

sur le sable sur la neige

j’écris ton nom

. . .

Sur les images dorées

sur les armes des guerriers

sur la couronne des rois

j’écris ton nom

. . .

Sur tous mes chiffons d’azur

sur l’étang soleil moisi

sur le lac lune vivante

j’écris ton nom

. . .

Sur les formes scintillantes

sur les cloches des couleurs

sur la vérité physique

j’écris ton nom »


Il ne reflète qu’une magnifique liste de phases de la vie, moments vécus et places visités, sur lesquels l’auteur écrira toujours « son » nom, en s’adressant au même sujet, peut-être sa muse ou la femme qu’il aime. C’est la dédicace d’amour que tout le monde aimerait recevoir. De la deuxième moitié, les lieux deviennent plus obscures, il y a de la souffrance dans les sujets choisis par Eluard, on aperçoit un changement de situation. Les images évoquées cessent d’être douces et légères, la beauté de la nature et des couleurs laisse place au désespoir, au désenchantement de la vie, à la mort et à la privation, comme on peut lire ensuite :


« Sur mes refuges détruits

sur mes phares écroulés

sur les murs de mon ennui

j’écris ton nom


Sur l’absence sans désir

sur la solitude nue

sur les marches de la mort

j’écris ton nom »

Ce sont les années de la seconde guerre mondiale, qui coupent violemment avec la période de paix déjà sur le fil du rasoir. Eluard écrit alors que Paris est sous l’occupation allemande, et le général Philippe Pétain gouverne au sud de la France, pendant le régime de Vichy. Ce sont des temps durs pour les citoyens français, mais ils sont bien plus durs pour ceux qui s’opposent et prennent clandestinement parti à la Résistance. Et après, place à la magie ; on découvre finalement le destinataire du poème :


« Sur la santé revenue

sur le risque disparu

sur l’espoir sans souvenir

j’écris ton nom


Et par le pouvoir d’un mot

je recommence ma vie

je suis né pour te connaître

pour te nommer

Liberté. »


Après sa publication, la poésie est imprimée sur d’innombrables prospectus qui pleuvent des avions des puissances alliées. Les villes françaises s’agenouillent devant la Liberté et continuent à se battre pour elle. Le poète a dit à plusieurs reprises avoir écrit « Liberté » à la place du nom de sa femme, car selon lui il n’existe pas d’amour plus grand que celui-ci de la liberté, qui est le premier et vrai besoin de l’être humain.


Nombreux sont ceux qui ont souffert l’apparent manque de liberté pendant la quarantaine, quand nous avons dû rester à la maison pour protéger la santé et la sécurité de tous, dans un moment de tragique incertitude, quand nous n’avions pas de masques ou de gel antibactérien. C’étaient des mois difficiles, vécus dans l’inconfort, accrochés au présent pour s’éloigner d’un futur précaire.

Certains nous ont laissés plus tôt que prévu.

Aujourd’hui il y a des gens qui risquent plus que d’autres, mais cachent leur peur et continuent leur vie, comme le personnel soignant qui fait de son mieux pour sauver ceux qui ont déjà été attaqués par l’ennemi invisible (je ne veux pas l’appeler par son vrai nom).


Si l’année 2020 nous a « privé » de la liberté, l’année 2021 nous invite à la récupérer grâce aux découvertes scientifiques qui nous donnent une nouvelle opportunité, à saisir avec le cœur rempli du même espoir qu’on avait l’hiver dernier, quand on enfournait nos premières pizzas home-made. La phrase « Tout ira bien » dira finalement la vérité, on vivra le printemps qu’on a regardé de loin l’année dernière, quand on chantait sur les balcons pour ne pas ressentir la solitude. On recommencera à se faire des câlins et, pourquoi pas, à discuter dans la queue du supermarché. On sourira encore.


Et alors, qu’elle soit Liberté.


Articolo a cura di: Benedetta Pitocco



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